Dr Mourad GOUMIRI.

L’une des leçons militaires que nous pouvons tirer du conflit ukrainien, c’est le rôle et la place de l’artillerie dans la victoire ou la défaite, lors d’un engagement des forces terrestres. S’agit-il de quelque chose de nouveau ? Qui se souvient de la bataille d’Agincourt qui a vu la débâcle des troupes françaises, supérieures en nombre, de celles anglaises, qui étaient équipées de « grands arcs » à très longue portée. Cette bataille consacre la fin de l’ère de la chevalerie et la suprématie des armes à distance, c’est-à-dire l’artillerie, qui va connaître des développements technologiques majeurs, comme les « orgues de Staline » au cours de la 2ème guerre mondiale et de la prise de Berlin, par le maréchal Joukov ou les missiles « sol-sol » et le fameux canon « césar » français, en fonction actuellement. La théorisation du concept du « carpet bomb », développé par l’USA (le général Schwartzkopf en Irak), consacre l’artillerie comme un élément décisif, lors de l’engagement des forces terrestres, dans une attaque en raz de campagne ou en zone urbaine.

L’occupation territoriale (en zone rurale ou urbaine) étant très coûteuse en personnel et en matériel, l’utilisation intensive de l’artillerie devient un atout majeur, avant toute offensive, pour minimiser les pertes humaines et détruire les capacités défensives de l’ennemi. C’est donc cette stratégie militaire ancienne que l’armée russe applique en Ukraine, avec des succès majeurs sur le terrain, tout en minimisant les pertes. Certes, cette stratégie est dévastatrice en termes de perte civile, appelées, par les « stratèges », de dégâts collatéraux, puisqu’il ne s’agit pas de tirs ciblés dits « chirurgicaux » mais bien d’un écrasement sous les bombes, d’une région ou une ville, ce qui permet par la suite aux forces terrestres d’évoluer dans un espace moins dangereux.

La seconde leçon est relative à la guerre médiatique réciproque qui sévit et qui met en relief les résultats dramatiques de l’action de l’artillerie sur les populations civiles qui se retrouvent otages des deux protagonistes. Les images diffusées, le plus souvent incontrôlables, sont chargées de mettre un frein à l’action destructrice de cette arme, qui d’un autre côté donne des victoires incontestables, à l’armée russe sans pertes significatives. C’est donc cette équation militaire qui va faire toute la différence et aucune des parties n’est prête à renoncer à cette arme, bien au contraire, les autorités ukrainiennes ne cessant de demander aux occidentaux des moyens d’artillerie pour inverser le rapport de force militaire.